L'Eglise orthodoxe russe est reunifiee

LA LIBRE BELGIQUE
Mis en ligne le 18/05/2007
- - - - - - - - - - - 
L'Eglise russe et sa branche en exil se reconcilient sous l'impulsion de Poutine.
Le schisme resultait de la "soumission" du clerge interne au regime sovietique.

L'Eglise orthodoxe russe et sa branche en exil se sont officiellement reunifiees jeudi matin, un evenement historique pilote par le president Vladimir Poutine qui tire un trait sur 80 ans de schisme, de persecutions et d'humiliations sous le regime sovietique.

Le metropolite Lavr, chef de l'Eglise orthodoxe russe a l'etranger, et le patriarche de Moscou et de toutes les Russies Alexis II ont signe l'acte de "communion canonique". Cet acte autorise desormais les pretres des deux Eglises a concelebrer l'eucharistie.

Selon le texte, l'Eglise orthodoxe russe a l'etranger, dont le siege est a New York, "fait partie integrante de l'Eglise orthodoxe russe". Le metropolite Lavr et Alexis II ont salue cette reunification et remercie Vladimir Poutine pour y avoir personnellement contribue, en lui remettant une icone. "Apres des decennies de schisme, on peut dire qu'il n'y a pas eu de vainqueurs. Tout le monde etait perdant, les croyants, la societe en general", a dit Vladimir Poutine.

Au terme d'une liturgie qui a dure plus de trois heures, le metropolite Lavr et Alexis II, de blanc et or vetus, ont pris la Communion dans le meme calice, signe spirituel de la reunification des deux branches. Places cote a cote, ils ont ensuite donne la Communion au clerge des deux Eglises reunies. Fait exceptionnel et en signe de festivite, les portes royales etaient ouvertes au moment de la Communion du clerge, ce qui n'arrive qu'une fois l'an, au moment de Paques. Un choeur masculin, puis mixte, compose de choristes des deux Eglises, a accompagne la liturgie, alors que plus de 3 000 personnes se sont rassemblees dans l'immense cathedrale du Christ-Sauveur a Moscou.

Fondee par l'emigration

"L'Eglise russe hors frontieres" fut fondee dans les annees 1920 par l'emigration qui avait fui la revolution bolchevique. En Union sovietique, au nom de l'atheisme triomphant, le clerge est persecute, toute catechese interdite, des eglises dynamitees. Le patriarche de l'epoque, Tikhon, lance en 1918 un anatheme a l'encontre du nouveau pouvoir. Les bolcheviques l'arretent puis l'assignent a residence, ou il meurt en 1925. Les persecutions poussent le successeur de Tikhon, Serguii, a proclamer en 1927 la loyaute de l'Eglise au gouvernement sovietique et a appeler le clerge en exil a cooperer avec le nouveau pouvoir. Cette declaration signe la rupture avec l'Eglise en exil, alors que le patriarcat est desormais sous controle etroit du KGB.

Apres une campagne de persecution sanglante dans les annees 1930, Staline "normalise" les relations avec le clerge pendant la Seconde Guerre mondiale, en rouvrant les eglises et en autorisant la catechese. Mais de nouvelles periodes de persecution "psychologique", avec infiltration du KGB, s'abattent sur l'Eglise par la suite. Elle ne sort de l'ombre que fin 1980 pendant la perestroika de Mikhail Gorbatchev.

Sous Vladimir Poutine, l'Eglise russe recouvre sa splendeur et occupe une place de plus en plus importante dans la societe. Le President s'implique personnellement dans la reunification, en rendant visite au metropolite Lavr en 2003 et 2005. Fortement symbolique, cette reunification n'a toutefois pas l'approbation d'une partie du clerge en exil, qui estime que le patriarcat doit d'abord se repentir de sa soumission au pouvoir sovietique et qu'il reste trop assujetti au pouvoir politique. (AFP)